La permaculture pour tous
Productive et respectueuse de la nature, la permaculture est terriblement à la mode. On s’imagine parfois que pour pratiquer cette technique de production agricole, il faut un grand terrain et des connaissances approfondies. Nous avons rencontré Aldo Placi, un permaculteur autodidacte qui cultive son petit jardin selon cette méthode et qui donne des conseils pour pratiquer la permaculture sur un espace encore plus petit comme un balcon. Mais tout d’abord :
Qu’est-ce que la permaculture ?
AP : C’est exploiter le terrain dans la durée. Le but est de faire des récoltes en harmonie avec la nature, bien entendu sans pesticides. On prend, mais on donne aussi. L’objectif est de prendre exemple sur la forêt, où le sol n’est jamais découvert. Toutes les feuilles mortes sont transformées en humus, ce qui fertilise le sol. On laisse certains légumes monter en graines pour qu’ils se ressèment naturellement. Un jardin ne doit pas être un gazon anglais, d’autant plus que certaines « mauvaises herbes » sont comestibles. Avec les méthodes agricoles actuelles, l’homme tue le sol.
Pourquoi avez-vous opté pour la permaculture ?
AP : J’ai été impressionné par les monocultures et je me suis posé des questions. Où y avait-il encore de la place pour les animaux dans ce genre d’endroits ? Je me suis renseigné et j’ai trouvé ce mode de culture en accord avec mes valeurs de respect de la terre et de la biodiversité.
Est-ce que la permaculture est adaptée au potager de M. et Mme Toutlemonde ?
AP : Oui. C’est un mode de culture familial. On peut récolter autant par permaculture que par des méthodes traditionnelles. On produit beaucoup de légumes différents sur une petite surface, dans un jardin, mais aussi dans des bacs ou des bouteilles de PET qu’on peut mettre sur son balcon. Par exemple, on peut prendre les feuilles de ce chou toute l’année, même en hiver. En dessous, on cultive des bettes et juste à côté, des tomates. Je n’ai rien inventé. Les anciens travaillaient déjà comme ça. J’applique le principe des trois sœurs, c’est-à-dire trois légumes qui vont bien ensemble et dont l’un supporte l’autre. Par exemple, je plante un maïs. Quand il a déjà un peu poussé, je plante à son pied des haricots grimpants. Le maïs devient alors le support des haricots. Pour couvrir le sol, je plante une courge. Ces trois plantes vont se développer et protéger le sol qui restera couvert. La mécanisation nous a éloigné de ces méthodes ancestrales.
Les buttes synergiques sont la clé d’une bonne récolte. Pour faire ces buttes, on met la terre végétale de côté, on met un tronc pourri ou du bois mort sur le sol, on les recouvre de compost et de terre végétale, puis de paille ou de feuilles. Cela permet de garder le sol couvert et de le maintenir humide. Ces buttes font environ 1,2m de large et 50 cm de haut. Leur longueur dépend de la taille du jardin. Ensuite, il ne faut plus mettre les pieds sur les buttes pour ne pas tasser le sol, donc il faut prévoir des sentiers entre les buttes. En une journée de travail, on peut aménager une butte d’environ 5m sur 1,2 ce qui est déjà une surface intéressante. Le but du paillage est d’éviter la croissance de plantes indésirables. Dans le bas de la butte, on plante, par exemple les oignons ou les poireaux, plus haut, on met les herbes aromatiques, la bourrache ou les salades. Mélanger les fleurs aux légumes améliore la pollinisation.
Pour la récolte, il faut veiller à restituer le maximum de la plante à la terre. Par exemple, il ne faut pas arracher les salades, mais les couper au ras du sol. On laisse la racine pourrir dans le sol. Les petits tunnels laissés par les racines mortes vont aérer le sol. Les feuilles non mangées sont également laissées sur la butte ou le sentier où elles se décomposeront et enrichiront le sol.
Quels sont les avantages et les inconvénients de la permaculture ?
AP : Avantages : 1) On est en paix avec la nature et on laisse un monde viable à la génération suivante. 2) C’est une méthode productive. Elle se répand d’ailleurs de plus en plus dans le monde. Inconvénient : la peur de changer de système. Pour vaincre cette peur, on peut commencer par de petites parcelles et les agrandir progressivement.
Propos recueillis par Sylvie Barbalat